Début mai, nous avons rendu visite à d’Amandine Steck, créatrice et restauratrice de vitraux, dans son atelier « L’Amande et l’Obsidienne » situé à Honfleur. Elle a en charge la restauration d’un vitrail de l’Eglise Saint Martin.
(Amandine Steck – Crédit photo : Arnaud Lombard)
LE VITRAIL
La verrière de l’Eglise Saint Martin à restaurer, est composée de trois panneaux pour une hauteur de 180 cm et une largeur de 65,5 cm, représente Marie au temple. Cette séparation le rend plus solide et plus facile à manipuler. Paradoxalement la solidité d’un vitrail tient aussi à une certaine souplesse de l’assemblage en plomb. Des barres de fer en forme de « T » scellées dans la maçonnerie et du mastic maintiennent ces différents éléments. Des vergettes, petites barres invisibles qui se fondent dans le motif, renforcent également sa résistance.
Le vitrail date de 1889/1890 et est l’œuvre de l’atelier ébroïcien des maitres verriers Duhamel et Marette.
(Vitrail dans l’Eglise Saint Martin avant dépose)
LA RESTAURATION
Pour certains travaux, et notamment la peinture sur verre, l’utilisation d’une table lumineuse est indispensable pour se rapprocher le plus possible du rendu final avec l’éclairage à la lumière naturelle après la pose.
(Vitrail en atelier - Parties haute et centrale sur table lumineuse)
(Vitrail en atelier - Partie basse sur table pleine)
Les techniques actuelles de restauration sont quasiment les mêmes que celles de l’époque de sa fabrication. Cela nécessite de nombreux outils et produits, voir ci-après.
Mais également de nombreuses étapes :
- Analyse et diagnostic (morceaux de verre ou plombs cassés ou disparus) pour identifier les travaux à réaliser.
- Relevé du réseau de plomb par réalisation d’un poncif, empreinte au carbone sur papier du relief des plombs.
- Relevé de la forme des pièces cassées et des morceaux de verre manquants avant dessertissage afin de réaliser un gabarit des fragments des pièces à reconstituer.
- Dessertissage des morceaux de verre en les dégageant du réseau de plomb qui les retient. Le risque de casser le verre est très important lors de cette étape.
- Nettoyage des éléments très légèrement à l’eau pour éviter d’effacer la peinture très fragile.
- Création des pièces manquantes, retouche des écailles sur la peinture des pièces existantes. Les grosses difficultés à ce stade sont d’obtenir une teinte compatible avec l’ensemble du vitrail et de reproduire « la main du peintre » d’origine. Malgré l’existence d’un nuancier théorique des couleurs sur différents verres, l’alchimie entre des éléments artisanaux (verres et pigments) irréguliers en qualité par construction et différente selon chaque couleur de verre rend le résultat difficilement maîtrisable lors de la cuisson. Une reprise de ce travail est parfois nécessaire.
(Nuancier des couleurs sur différents verres)
- Collage des morceaux de verre cassés le plus discrètement possible soit à l’aide de silicone soit par l’utilisation de rubans de cuivres adhésifs dits « tiffany ». Ces derniers sont ensuite assemblés par une soudure à l’étain.
(Collage avec silicone dans l’habit bleu) (Collage avec rubans de cuivres adhésifs dans l’habit blanc)
- Mise en place d’un doublage en verre blanc au dos des pièces collées avec de multiples fragments. Les collages restant fragiles à la manipulation et aux contraintes physiques, le doublage vient assurer un renfort de la pièce collée.
- Ressertissage des pièces à l’aide d’un chemin de plomb neuf. Ce dernier demande beaucoup d’expérience pour trouver le meilleur compromis entre le visuel des éléments importants de la représentation (tête, mains ...) et la solidité. Les intersections sont soudées à l’étain (baguettes de 60% étain, 40% de plomb) pour maintenir l’ensemble.
(Pose du plomb neuf autour d’une pièce) (Ressertissage des pièces)
- Masticage à l’extérieur pour assurer l’étanchéité avec le plomb sans endommager la peinture à l’intérieur.
L’ensemble de ces opérations pour le vitrail de l’Eglise Saint Martin nécessite environ 60 heures de travail.